Sous-décalage du ST. Généralités

Déviation du segment ST au-dessous de la ligne de base. L’amplitude de la déviation se mesure à la fin du QRS (au point J) par comparaison avec le segment PQ. Au cours d’un ECG d’effort, elle se mesure à 40 voire 80 ms au niveau du point J.

 

Le mécanisme électrophysiologique s’explique par la perte de capacité des cellules sous-endocardiques à atteindre une amplitude de dépolarisation identique aux cellules sous-épicardiques (théorie de la « dépolarisation incomplète ») et/ou par une différence de potentiel de repos entre les deux couches (théorie du « courant de lésion »).

 

Valeur seuil pour un sous-décalage anormal du point J : dans les dérivations V2 et V3 cette valeur est ≥ 0,05 mV (0,5 mm) et dans les autres ≥ 0,1 mV (1 mm) pour les hommes et les femmes de tous âges [1]. Néanmoins, en situation clinique ischémique, un sous-décalage de ST < 0,05 mV en V2-V3 ou < 0,1 mV dans les autres est évocateur d’un mécanisme ischémique et aggrave le pronostic [2].

 

Pour en déterminer l’étiologie, il faut procéder comme pour l’analyse d’un sus-décalage de ST [4]

  • connaître les circonstances cliniques et le terrain (sexe, âge, sport, ethnie…),
  • préciser le rythme, la fréquence cardiaque et la conduction intracardiaque
  • analyser la ligne de base afin d’écarter une repolarisation atriale et vérifier le calibrage (1 mm = 0,1 mV)
  • définir le territoire électrique concerné (concordant ou diffus)
  • préciser l’amplitude du sous-décalage au niveau du point J (mV ou mm) par rapport au segment PQ, la courbure (rectiligne, convexe ou concave) et l’orientation (horizontal, descendant ou ascendant)
  • rechercher des complexes QRS modifiés par l’ischémie et des anomalies de l’onde T en faveur d’une étiologie ischémique (ischémie coronaire, anévrisme), un sus-décalage de ST dans une seule dérivation (ex. VL, DIII, V1, V2 ou VR)
  • rechercher l’existence d’anomalies ECG en faveur d’une étiologie non ischémique (ex. péricardite, hyperkaliémie, embolie pulmonaire, takotsubo, préexcitation, repolarisation Brugada…)
  • étudier la relation entre dépolarisation et repolarisation afin d’envisager un trouble secondaire de la repolarisation ; en effet, un bloc de branche gauche, une hypertrophie ventriculaire, une préexcitation ou un rythme électro-entrainé expliquent de nombreux ST+
  • vérifier la règle de la discordance appropriée en cas de complexes QRS larges (cf. Critères de Sgarbossa)
  • rechercher le caractère ancien (comparaison avec des tracés antérieurs), stable ou dynamique des anomalies (ECG de quart d’heure en quart d’heure, test à la trinitrine en cas de douleur thoracique)
  • enfin proposer une hypothèse « électrocardiographique » qui réponde le mieux à la question clinique (cf. ECG : lecture, analyse et synthèse).

En situation clinique compatible avec une ischémie coronaire, un sous-décalage de ST évoque un syndrome coronaire aigu sans sus-décalage de ST (Voir recommandations ESC 2020 [3]).

 

Lire. P. Taboulet. 100 autour de l’infarctus.  S-édition (2020)

 

Voir aussi sous-décalage de ST. Etiologies

[1] Thygesen K, Alpert JS, Jaffe AS, et al. ESC Scientific Document Group. Fourth universal definition of myocardial infarction (2018). Eur Heart J. 2018; 138(20):e618-e651. (téléchargeable)

[2] Wong PS, el Gaylani N, Griffith K, et al. The clinical course of patients with acute myocardial infarction who are unsuitable for thrombolytic therapy because of the presenting electrocardiogram. UK Heart Attack Study Investigators. Coron Artery Dis 1998; 9:747–52.

[3] Collet JP, Thiele H, Barbato E, et al. 2020 ESC Guidelines for the management of acute coronary syndromes in patients presenting without persistent ST-segment elevation European Heart Journal, Volume 42, Issue 14, 7 April 2021, Pages 1289–1367. (téléchargeable)

[4] Taboulet P. Diagnostic ECG du syndrome coronarien aigu. Partie 4. Les diagnostics différentiels. Ann. Fr. Med. Urgence 2013; 3:20-27