Ischémie myocardique

Le terme ischémie myocardique est large et s’emploie quand la perfusion coronaire est insuffisante pour les besoins du cœur. Elle peut être asymptomatique ou s’accompagner de signes cliniques chroniques d’ischémie myocardique (ex. angor, arythmie ventriculaire, insuffisance cardiaque); elle peut être aiguë et symptomatique et s’accompagner d’un SCA ou d’un infarctus. Elle peut être en relation avec une maladie des coronaires ou un déséquilibre fonctionnel entre les besoins et les apports en oxygène au myocarde (cf. SCA définitions).

L’ECG est un outil incontournable pour la détection des signes d’ischémie myocardique, quel qu’en soit le stade, ischémie silencieuse, angor, syndrome coronaire aigu, infarctus ou séquelle de nécrose. Un ECG d’effort peut être utile en l’absence de signes évidents d’ischémie clinique ou électrique.

Les signes ECG en regard d’une électrode donnée dépendent de la sévérité (occlusion complète ou incomplète, qualité du lit d’aval, préconditionement…), la durée et la couche de cellules myocardiques ischémiées. Ils peuvent manquer au repos. La couche sous-épicardique est plus résistante à l’ischémie que la couche sous-endocardique, en raison d’une meilleure perfusion naturelle et d’un moindre travail musculaire. Une atteinte de cette couche correspond donc à une ischémie transmurale.

En cas d’ischémie incomplète ou brève, seule la repolarisation est altérée et on observe des signes réversibles d’« ischémie » ou de « lésion » dans des dérivations concordantes avec un territoire électrique coronaire. Ces signes correspondent aux deux premiers grades d’une ischémie coronaire décrite dans la classification de Sclarovsky-Birnbaum [1].

  • Une « ischémie » aiguë (grade 1) correspond classiquement à une onde T trop ample, symétrique et large (cf. Ischémie sous-endocardique, alternance électrique de l’onde T).
  • Une « lésion » (grade 2) est une anomalie du segment ST (cf. Lésion sous-endocardique ou Lésion sous-épicardique).
  • Une prolongation de l’intervalle QT ou une anomalie des ondes U, trop amples ou inversées sont parfois visibles dans les cas sévères.
  • L’ECG peut être normal ou fluctuant [6].

Évolution

  • Si l’ischémie régresse, les anomalies de l’onde T et du segment ST régressent, tandis que l’onde T s’inverse puis se normalise (cf. Ischémie sous-épicardique, onde T inversée, reperfusion coronaire, Syndrome de Wellens). Une onde T inversée dans les dérivations où le segment ST est isoélectrique traduit une phase subaiguë ou une reperfusion (« postischemic changes »), mais n’est pas un signe d’ischémie active [5].
  • Si l’ischémie est incomplète, mais prolongée, une anomalie définitive de l’onde T ou du segment ST est possible (« infarctus non transmural »).

En cas d’ischémie sévère et prolongée, la dépolarisation et la repolarisation sont altérées. On observe des signes d’infarctus transmural.

Les signes ECG observés doivent être interprétés avec rigueur en combinaison avec la clinique et si besoin la biologie et l’imagerie (cf. ECG en situation ischémique) [4]. Ils peuvent régresser spontanément ou après traitement (cf. Reperfusion coronaire).

 

Blog S. Smith

 

[1] Birnbaum Y, Sclarovsky S. The grades of ischemia on the presenting electrocardiogram of patients with ST elevation acute myocardial infarction. J Electrocardiol 2001;34 Suppl:17-26.

[2] Taboulet P, Smith SW, Brady W.J. Diagnostic ECG du syndrome coronarien aigu : Partie 2. Les anomalies de la repolarisation. Ann. Fr. Med. Urgence 2013; 3:79-88

[3] Taboulet P, Smith SW, Brady W.J. Diagnostic ECG du syndrome coronarien. Partie 3. Les anomalies des complexes QRS. Ann. Fr. Med. Urgence 2013; 3:151-159

[4]  Collet JP, Thiele H, Barbato E, et al. 2020 ESC Guidelines for the management of acute coronary syndromes in patients presenting without persistent ST-segment elevation [published online ahead of print, 2020 Aug 29]. Eur Heart J. 2020;ehaa575.Voir Blog de SW Smith

[5] de Luna AB, Zareba W, Fiol M, et al. Negative T wave in ischemic heart disease: a consensus article. Ann Noninvasive Electrocardiol. 2014;19(5):426-441. (téléchargeable)

[6] A 76 Year Old Female With Recurrent Syncope, Lightheadedness, Palpitations and Negative Stress Test