ECG : sportif normal

On recense en France en 2019 environ 18,4 millions de licences et autres titres de participation délivrés par l’ensemble des fédérations agréées par le Ministère des Sports [15]. Le sport est une activité bonne pour la santé, mais qui peut être associée à un risque de mort subite. « Un jeune âgé de 12 à 35 ans meurt presque chaque jour en France en faisant du sport » selon les données françaises de mort subite liées à une pratique sportive publiée en 2014 (plus de 1000 morts par an au total et environ 300 chez les 12-35 ans) [7].

La mort d’un jeune athlète en forme est extrêmement rare. La fréquence est estimée à environ 1 pour 200 000, avec une variabilité considérable selon les registres [16]. Les causes médicales identifiées sont rares en cas de mort subite, en majorité la Cardiomyopathie hypertrophique [17].

Que préconise la loi en matière de dépistage ? Les sportifs français inscrits sur la liste du haut niveau ou dans les filières d’accès au haut niveau (environ 15 000 sujets) bénéficient d’une prise en charge unique au monde avec pratique systématique d’examens de dépistage (ECG, échocardiographie, épreuves d’effort). Par contre pour le tout venant des sportifs de compétition, les textes ne prévoient qu’un certificat de non contre indication à la pratique d’un sport en compétition basé sur des données uniquement cliniques [1].

L’ECG est pourtant un bon outil de screening pour le dépistage d’une cardiopathie chez le sportif. Il renforce l’efficacité (faible) de l’interrogatoire et de l’examen clinique [3][13].

En France, la Société Française de Cardiologie (SFC) recommande depuis 2009 pour l’obtention d’une licence sportive, un ECG 12 dérivations au repos [1].

  • “aux athlètes de compétition âgés de 12 à 35 ans,  en complément de l’examen physique et de l’interrogatoire personnel et familial, tous les trois ans jusqu’à l’âge de 20 ans puis tous les cinq ans de 20 à 35 ans (car après 20 ans l’expression phénotypique évolue moins)” [1][3].
  • “aux sportifs pour toute reprise d’activité à partir de 35 ans pour les hommes et 45 ans pour les femmes et pour tous les sujets à haut risque cardiovasculaire”.

En Amérique et dans d’autres pays son usage systématique est contesté en raison de son manque de sensibilité et spécificité (et de coût !) [4]. Le dépistage d’une cardiopathie à risque de mort subite est en revanche beaucoup plus réglementé, précoce et répété, en Italie [14].

La lecture de l’ECG de repos chez un sportif a pour but de reconnaître :

  • les modifications physiologiques ECG secondaires à l’entrainement de haut niveau (sport > 8 h/semaine). Ces modifications physiologiques s’observent chez la moitié des sportifs et leur prévalence varie selon l’âge, le sexe, le type de sport, le niveau d’entraînement et les critères électriques retenus. Cette lecture doit donc être assurée par un professionnel averti [1][5][8].
  • les anomalies qui peuvent préexister (ou apparaître) et conduire à une mort subite [3]. Voir : ECG sportif pathologique

MODIFICATIONS physiologiques

Des modifications physiologiques s’observent chez la moitié des sportifs et leur prévalence varie selon l’âge, le sexe, le type de sport, le niveau d’entraînement et les critères électriques retenus (Sharma S, ESC 2018) [5].

  • Une bradycardie sinusale < 50/min (parfois < 40/min) associée à une arythmie respiratoire prononcée est souvent la seule particularité. Elle témoigne d’un tonus parasympathique accru et peut s’accompagner d’un remodelage sinusal avec, à long terme, une maladie du sinus [1]. Des pauses sinusales < 3 secondes sont habituelles, en particulier la nuit. Des bradycardies majeures (< 40/min) sont relativement rares. On peut parfois observer temporairement un rythme ectopique atrial bas (Cf. Wandering pacemaker) ou un rythme d’échappement, le plus souvent jonctionnel. Après un test maximal d’effort classique, la récupération est considérée comme normale si la baisse de la FC est supérieure à 12 battements par minute au terme de la première minute. Une baisse inférieure à 25 battements à la 3e minute est un facteur de risque de surmortalité [2].
  • Des complexes QRS amples (« hypervoltés ») en précordiales sont fréquents et il n’est pas rare chez l’homme qu’un indice d’hypertrophie ventriculaire gauche ou droit soit positif (Cf. Variantes ECG de la normale). Rappelons que l’indice de Sokolow-Lyon de l’HVG n’est positif qu’à partir de 45 mm chez l’homme jeune. Chez le sportif, les indices de Cornell ou de Perugia (ou Romhilt-Estes) sont plus adaptés pour exclure une HVG [9].
  • Un indice QRS d’hypertrophie ventriculaire droite (RV1 ≥ 6 mm) est fréquent, généralement bénin isolément. L’indice de Sokolow-Lyon pour une HVD (RV1 + SV5-6 > 10,5 mm) n’est ni sensible ni spécifique et ne doit pas être utilisé seul comme élément de contrindication de la pratique sportive [18]. Un axe droit améliore nettement la reconnaissance d’une authentique HVD.
  • Une hypertrophie atriale gauche ou hypertrophie atriale droite est bénigne isolément [6].

 

Certains troubles de conduction sont bénins isolément  :

  • Bloc de branche droit incomplet
  • Bloc de branche droit complet isolément (il faut rechercher une cardiomyopathie arythmogène si ≥ 2 anomalies ECG borderline ou patient symptomatique) [5].
  • BAV du 1er degré (jusqu’à 400 ms), voire un BAV du 2e degré Wenckebach sont possibles chez le sportif [5][6]. Ils sont habituellement régressifs à l’effort [4].

 

Des variantes de repolarisation ventriculaire sont fréquentes, en particulier chez les athlètes avant 16 ans ou chez l’homme d’origine afro-caribéenne. Elles sont généralement bénignes quand les anomalies sont mineures et disparaissent à l’effort ou après l’arrêt de l’entrainement.

  • Des ondes T inversées ondes T inversées de V1 à V3(V4) sont fréquentes chez un athlète jeune (” Juvenile T-wave pattern” Cf. Repolarisation juvénile). En revanche, des ondes T inversées en V2-V3 après l’adolescence (ex. > 16 ans [5]) ou dans les précordiales autres que V1, DIII, VR justifient un suivi cardiologique avec imagerie (Cf. ECG sportif pathologique).
  • Une repolarisation précoce (avec onde J), le plus souvent dans les dérivations latérales ou inférieures, est fréquente en particulier chez le sportif d’origine africaine (Cf. Repolarisation précoce).
  • Un sus-décalage de ST en dôme associé à une onde T diphasique à convexité proximale en V1-V4 est assez caractéristique du grand sportif d’origine africaine (« black athlete repolarization variant » voir ECG figure 5 dans [5]), mais la bénignité est un diagnostic d’élimination (Cf.  Inversion bénigne de l’onde T) [10][11].
  • Un intervalle QTc < 470 ms chez l’homme ou < 480 ms chez la femme est acceptable en l’absence d’antécédent familial de mort subite. La technique de mesure peut être complexe (choix de la dérivation, formule de correction du QT selon la fréquence cardiaque: Cf Intervalle QTc). Les auteurs du consensus de 2018 la décrive minutieusement [5].

Certains troubles de l’excitabilité atriale ou ventriculaire sont acceptables.

  • Une ESV ou ESA par tracé ECG de 10 sec est acceptable (2 ESV par tracé est considéré anormal et justifie des explorations) [5]
  • La visibilité d’une seule extrasystole ventriculaire par ECG est acceptable
  • Certaines ESV sur coeur prouvé sain (cf. ESV infundibulaire) [4].

Pour une prescription de bilan de santé [6]

Rédaction du certificat médical (thèse de doctorat en médecine (David Refahi) on line) [12]

Les 10 règles d’or du sportif : Le Club des Cardiologues du Sport a édicté 10 règles de bonne pratique du sport (50) afin de sensibiliser les sportifs sur les comportements à risque et les symptômes suspects nécessitant une consultation médicale. Règles 1, 2 et 3 : Je signale à mon médecin toute douleur dans la poitrine ou tout essoufflement anormal, toute palpitation cardiaque, tout malaise en lien avec l’effort. Chevalier et al. (51) a démontré que les sportifs ne consulteraient pas en cas de survenue d’un symptôme anormal dans 70 % des cas. Règle 4 : Je respecte toujours un échauffement et une récupération de 10 minutes lors de mes activités sportives. Règle 5 : Je m’hydrate régulièrement à l’entraînement comme en compétition. Règle 6 : J’évite les activités intenses par des températures extérieures défavorables (< 5°C ou > 30 °C) et lors des pics de pollution. En effet, la pollution est responsable d’évènements cardiovasculaires (52). Règle 7 : Je ne fume jamais 2 heures avant ou après une pratique sportive. Règle 8 : Je ne consomme jamais de substances dopantes et j’évite l’automédication en général. Règle 9 : Je ne fais pas de sport intense en cas de fièvre, ni dans les 8 jours qui suivent un épisode grippal (fièvre, courbatures). Règle 10 : Je pratique un bilan médical avant de reprendre une activité sportive intense si j’ai plus de 35 ans pour les hommes et plus de 45 ans pour les femmes.

 

MODIFICATIONS pathologiques

–> ECG : sportif pathologique

 

Autres informations (Mont 2018) et références détaillés voire commentés (réservées aux abonnés)


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