Indice d’HVG : 1. généralités

Les indices d’HVG sont des signes ECG en faveur d’une augmentation de la masse musculaire du ventricule gauche.

Les signes directs sont des anomalies de voltage des complexes QRS liées à la relation directe entre masse ventriculaire et activité électrique (plus la masse augmente, plus les QRS sont amples) (description AHA 2009 [1]).

Les signes indirects sont liés à des modifications de conduction intraventriculaire (durée, forme ou axe des QRS) et au retentissement sur la repolarisation ventriculaire et sur l’oreillette gauche.

Aucun indice isolé n’est suffisant pour le diagnostic, mais objective une sévérité  (Bacharova L 2024).

1 – Indices de voltage QRS en monodérivation

Frontales

  • RDI > 15 mm (plus spécifique si RDI > 20 mm),
  • RVL > 11 mm ou RVF (DII ou DIII) > 20 mm (Sokolow-Lyon voltage)
  • RVL > 12 mm (Minnesota Code Classification),
  • R + S > 19 mm en n’importe quelle dérivation

NB. RVL qui explore l’épaisseur de la paroir latérale du VG dans le plan frontal est un indice important. Pour certains auteurs, l’absence d’amplitude de R en VL ≥ 5 mm doit remettre en question la possibilité d’une HVG chez l’hypertendu. Pour d’autres, la valeur de R en VL offre une bonne performance diagnostique et pronostique des évènements CV chez l’hypertendu.

Précordiales

  • SV1 > 23 mm ou SV2 > 25 mm (plus spécifique si SV1/V2 > 30 mm),
  • RV5 > 33 mm ou RV6 > 25(26) mm (indice de Lenègre ou Wilson),
  • RV5/V6 > 1 (indice de Holt) ou RV5-V6 > 26 mm,
  • R + S > 35 mm en une dérivation (score de Sokolow modifié, plus spécifique si > 45 mm),
  • SV1/2 > 30 mm, RV5/6 > 30 mm ou RI/II/III/aVF > 20 mm (Romhilt-Estes point score).

2 – Indices de voltage QRS en multidérivation

  • Indice de Sokolow positif si SV1 + RV5/V6 ≥ 45 mm chez l’homme jeune (ou sinon ≥ 35 mm). Il existe d’autres indices dérivés : l’indice de Romhilt positif si SV2 + RV5/V6 ≥ 45 mm et l’indice de Murphy (ou Sokolow modifié) positif si SV1/V2 + RV5/V6 ≥ 35 mm (plus sensible, mais moins spécifique). L’ indice de Sokolow est moins spécifique dans l’ethnie africaine et moins sensible chez les caucasiens hypertendus, mais meilleure en cas d’HVG excentrique et chez les obèses chez qui il faut changer les seuils.
  • Indice de Cornell positif si RVL + SV3 > 20 mm (femme) ou > 28 mm (homme). Il semble plus sensible chez l’hypertendu et l’obèse que l’indice de Sokolow, mais perd de sa sensibilité avec l’âge ou dans l’ethnie africaine ; des valeurs plus basses comme l’indice de Perugia positif si RVL + SV3 > 20 mm (femme) ou > 24 mm (homme) ou RVL + SV3 > 19 mm (femme) ou > 23 mm (homme) sont plus sensibles.
  • Indice de Peguero-Lo Presti positif si SDeepest + SV4 ≥ 23 (femme) ou 28 mm (homme) : excellente spécificité (90%) avec une sensibilité 62% supérieure à Cornell 35%. Attention au risque de faux positifs avec les indices de Cornell ou de Peguero en cas de bloc fasciculaire antérieur gauche et chez les hommes jeunes (faux positifs)
  • Indice de Gubner-Ungerleider : RDI + SDIII > 25 mm
  • Indice de Lewis (1914) : (RDI – SDI) – (SDIII – RDIII) > 16 mm
  • Score de Framingham : (RVL > 11 mm) ou (RDI + SDIII > 25 mm) ou (SV1/2/3 > 25 mm) + (RV4/5/6 > 25 mm) ou (SV1-2 + RV5-6 > 35 mm) ou surcharge ventriculaire (1 point par item)
  • RS VF+V2+V6 (> 30 ans) > 59 mm (Indice de Manning 1964)

 

 

Pour une mesure précise des amplitudes de QRS, la position des 10 électrodes doit être rigoureuse, en particulier sur le thorax (Cf. électrodes précordiales). Il ne faut pas rapprocher les électrodes des membres vers les racines ou le thorax/abdomen (cela amplifie les amplitudes de QRS), ni ultrafiltrer les signaux par réduire les parasites (cela réduit les amplitudes de QRS) (Cf. Filtres)

3 – Signes associés 

Des signes associés doivent être recherchés car ils renforcent la présomption d’HVG.

  • Surcharge ventriculaire. Il s’agit d’une anomalie de repolarisation assez caractéristique du remodelage électrique induit par une HVG (cf. Strain pattern). Ce sous-décalage particulier du segment ST est parfois le seul signe en faveur d’une HVG. Il en aggrave le pronostic.
  • Complexes QRS larges ≥ 110 ms qui peuvent atteindre 120-130 ms chez l’homme et s’accompagnent d’un mauvais pronostic (cf. QRS larges). Prolongation de la déflexion intrinsécoïde en V5-V6 ≥ 50 ms ou complexes QRS fragmentés.
  • Axe gauche (ÂQRS < 30°) et bloc fasciculaire antérieur gauche
  • Hypertrophie atriale gauche ou fibrillation atriale

Le score de Romhilt-Estes (” Romhilt-Estes point score “) propose de combiner indices directs et indirects pour prédire plus précisément le risque d’une HVG, mais sa sensibilité diagnostique reste faible (Romhilt DW (1968), Pewsner D (2007).

L’informatique a introduit récemment d’autres critères plus performants comme les produits du voltage par la durée du QRS (le time voltage Cornell index) , la surface réelle des QRS et des scores plus complexes intégrant des multiparamètres ECG mais aussi l’âge, le genre et le BMI.

4 – Performance des signes ECG

Certains signes ont une excellente spécificité (voisine de 90%), mais une sensibilité faible (voisine de 30%) comparée à l’échocardiographie [1][1bis]. En effet, l’ECG sous-estime la masse du VG quand le muscle ventriculaire électrique est peu ou pas actif électriquement comme dans les cas de fibrose, nécrose, amylose ou que l’activité électrique est faible pour des raisons techniques (malposition des électrodes, tracé hyperfiltré) ou morphologiques (femme, obésité, emphysème, épanchement…) [1]. La combinaison des indices d’HVG offre une valeur diagnostique et pronostique bien supérieure à l’emploi d’un indice isolément. Leur valeur prédictive positive est excellente lorsque la prévalence de la maladie est haute (≥ 50 ans, obésité, HTA). Leur présence aggrave en général le pronostic vital des sujets hypertendus ou atteints de valvulopathie.

Les indices d’hypertrophie ventriculaire sont moins performants (moins sensibles) chez la femme, avec l’âge (≥ 60 ans) ou l’obésité et en cas de processus dégénératif du myocarde (remplacement des cellules électriques par de la fibrose, de la nécrose, des adipocytes, de l’amylose…). Ils sont aussi moins performants (moins spécifiques) chez l’homme jeune sain, en particulier sportif ou originaire d’une ethnie africaine, chez qui il est n’est pas rare d’observer des QRS amples et fins (ex. ≥ 20 mm en dérivations frontales ou ≥ 35 ms en V3 ou V4). Vidéo formation sur les faux positifs ici (10 min).

La fréquente malposition des électrodes précordiales ou un filtre passe-haut choisi trop bas (ex ≤ 40 Hz) diminue l’amplitude des QRS et réduit leur valeur diagnostique et la reproductibilité de l’ECG [27]. Tous les facteurs qui modifient la distance entre le cœur et le thorax peuvent modifier significativement l’amplitude des QRS (position du patient, fréquence cardiaque, volémie, pathologie pulmonaire etc.) [28]. A l’inverse, le positionnement des électrodes des membres sur le thorax ou abdomen ou un enregistrement per tachycardie augmentent l’amplitude des QRS. Les tracés peuvent varier parfois significativement d’un enregistreur à un autre (ex 12 D versus 4 D).

En pratique

Le diagnostic de remodelage ventriculaire gauche est possible en présence d’un seul indice d’amplitude monodérivation (en exigeant une amplitude adaptée à l’âge et au sexe), mais le diagnostic sera plus certain en présence de plusieurs indices d’amplitude (monodérivation ou combinés) et des signes associés indirects en particulier chez les sujets jeunes masculins chez qui les complexes QRS peuvent être hypervoltés.

Les plus utilisés sont l’indice de Sokolow et l’indice de Cornell, mais l’indice de Murphy complète bien le Sokolow et l’indice de Peguero complète bien le Cornell. Les voltages de QRS en dérivations frontales sont importants en particulier dans la dérivation VL (HVG suspecte si ≥ 11 mm) ou DI (intégrés dans les indices de Lewis et celui de Indice de Gubner-Ungerleider). L’existence d’une surcharge ventriculaire gauche (strain pattern) ou de complexes QRS élargis doivent faire évoquer le diagnostic et rechercher attentivement d’autres indices.

 

NB. Il est possible de faire le diagnostic d’HVG en cas de BBG ou en cas d’HVG avec BBD

 

Vidéo formation Youtube (24 min) : L’ECG de l’hypertrophie ventriculaire gauche

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