Technique de suppression du « bruit » autour du « signal » produit par un électrocardiographe.
Les bruits de haute fréquence sont provoqués par l’activité musculaire extracardiaque et les interférences dues aux appareils électriques. Il sont responsables de parasites/artéfacts sur le tracé qui gêne la lecture.
Les bruits de basse fréquence sont provoqués par les mouvements du corps liés à la respiration, les changements physicochimiques induits par l’électrode posée sur la peau et les micro variations du flux sanguin. Ils sont surtout responsables d’une déviation de la ligne de base et donc d’un tracé ondulant ou qui modifient certains segments lents d’un ECG comme le segment ST.
La tentation est de sur-filtrer les tracés pour qu’ils soient jolis… Mais, plus un tracé est filtré, plus les signaux propres aux patients sont modifiés [1][2][3][4]. Il faut trouver un compromis…
Bande passante
Les constructeurs sont tenus de proposer un enregistrement ECG dans une bande passante (ou intervalle de fréquences non filtrées) entre 0,05 Hz et 150 Hz chez l’adulte (250 Hz chez l’enfant) [1]. Mais la majorité des appareils du marché proposent des filtres pré-réglés entre 0,05-0,1 et 40-50 Hz, car le tracé est plus stable, moins parasité et cela donne plus de satisfaction aux utilisateurs « de base » [4]. C’est le compromis retenu généralement par les utilisateurs qui ne maitrisent pas les finesses de l’ECG… et acceptent le risque de faux positifs/négatifs, certes rares, qui peuvent être induits par des filtres inopportuns.
Le mieux est de décider soi même du réglage des filtres de basse et haute fréquence, en fonction de la qualité du tracé avant impression. Cela est possible facilement avant ou même après enregistrement sur les appareils modernes, grace à la numérisation et l’enregistrement des tracés.
Avant d’augmenter la bande passante, il faut en rechercher la cause comme le tremblement d’un membre ou une électrode posée sur une artère (dans ce cas, l’une des dérivations frontales n’est pas parasitée : voir artéfacts).
Modifications ECG par les filtres
Le filtre passe-bas (« low-pass »)
Il supprime les bruits de haute fréquence, au-dessus du seuil de 150 Hz [1]. Un filtre passe-bas ≤ 75 Hz lisse le tracé et fait disparaître de nombreux artefacts rapides [2]. Ce réglage réduit légèrement l’amplitude des QRS et la capacité à détecter de petites déflexions (micro onde Q, complexes QRS fragmentés, onde J, onde epsilon).
A gauche. Epsilon Wave-Effect of Frequency (Ken Grauer)
Un filtre passe-bas calibré à 35 Hz voire 20 Hz réduit de 10 à 20% l’amplitude des QRS et peut réduire des indices d’hypertrophie ventriculaire (voir ci-dessous).
Les filtres passe-bas < 150 Hz réduisent les parasites à fréquence rapide, mais réduisent aussi l’amplitude des QRS
Le filtre passe-haut (« high-pass »)
Il supprime en mode réel les bruits de basse fréquence, en dessous du seuil de 0,05 Hz [1]. Si on calibre le filtre passe-haut à 0,5 Hz, on enregistre/engendre des petites distorsions du segment ST [3] qui peuvent exceptionnellement simuler un infarctus ST+ antéroseptal [5] ou un ECG Brugada. Un filtre linéaire numérique est acceptable jusqu’au seuil de 0,67 Hz, car il supprime les déviations de la ligne de base.
On peut regretter que la valeur et l’impact des filtres ne figurent pas clairement sur le tracé, au côté du constructeur, du nom de la machine, du système d’interprétation et la date de sa mise à jour… Il faut exiger cela, lors des réglages machine par l’ingénieur ou le commercial (et la formation qui va avec etc.).
Filtre CA
Pour supprimer l’interférence due au courant électrique alternatif, les appareils utilisent aussi un filtre CA pour suppression des 50 ou 60 Hz (selon les pays) [1].
Filtre anti-dérivation
Un filtre linéaire numérique est acceptable jusqu’au seuil de 0,67 Hz, car il supprime les déviations de la ligne de base.